Comment se faire enguirlander sans avoir rien demandé


Il est 18 heures environ. Un jour de la semaine semblable aux autres. Perdue dans mes pensées. Neuf minutes me sépare du prochain bus qui me ramènera - plutôt cahin que caha - à la maison.

Automobiles, bus, mobylettes, motos toutes cylindrées passent en un flot ininterrompu. Ça pétarade, ça vrombit, ça rugit, ça klaxonne ... bref ça fait un potin assourdissant.

Pour éviter de me laisser gagner par l'impatience, je sors mon téléphone et en profite pour envoyer quelques messages et finaliser un rendez-vous le lendemain. Pendant ce temps, en une incessante valse à trois temps, d'autres bus que celui espéré s'arrêtent, chargent leur cargaison humaine puis repartent sans que je ne m'en émeuve plus que ça.

Une voix particulièrement affûtée se faufile soudainement jusqu'à mes oreilles : "Alors, vous ne m'avez pas entendue ! ". Sûr que sa propriétaire s'était rincée la bouche au vinaigre le matin même.

Un pantalon bleu, un pull vert, des lunettes, des cheveux en bataille, un visage entre deux âges et une paire de béquilles s'impriment sur mes pupilles. Et toujours cette voix aigrelette qui accuse : "je vous ai demandé d'arrêter le bus".

Pardon, à vos ordres, ai-je pensé en m'excusant : "désolée, je ne prêtais pas attention". 

Le vinaigre se fait encore plus aigre : "Bah oui, vous étiez au téléphone et pourtant je vous ai demandé gentiment". 

Comment dire là.  Je me sens Agrippine. Comment la mère de Néron ? Mais non. L'autre, la contemporaine. Héroïne de Claire Brétecher. L'impertinente qui lui aurait  probablement répondu : fais hièche. Mais que voulez-vous, je suis lâche. Ou polie. Je n'ai pas rétorqué. Parfois, ce n'est pas l'envie qui manque.


#penible
#morose



Commentaires

Articles les plus consultés